entretien avec Pierre Drossart
Entretien avec le groupe énergie-climat
La décennie à venir est cruciale. Tous les secteurs de la société doivent s’engager dans la transition. L’OP doit y prendre sa part.
Les objectifs de décroissance des émissions de GES et de consommation d’énergie pour les établissements publics sont fixés par la loi sur la transition énergétique de 2015 - réduire de 50% la consommation énergétique entre 2012 et 2050 - réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030. Obligation d’un DPE depuis 2007. Obligation d’un bilan carbone (scopes 1 et 2) depuis 2012.
Quelle priorité ont pour vous ces objectifs pour l’OP dans les 5 années à venir ? Comment comptez-vous procéder pour les atteindre ?
R. L’Observatoire est un EPST dont les missions principales concernent recherche et enseignement et il comporte de nombreuses priorités ; les objectifs de réduction de consommation sont très importants et doivent être inclus dans celles-ci. Elles sont, comme voté dans une déclaration du CA au cœur des priorités de l’Observatoire, mais ne peuvent non plus préempter les questions de sécurité des personnels qui sont nécessairement en première priorité. La question est plutôt de trouver l’équilibre dans la répartition des budgets pour mettre en place les programmes : or, un budget ne pourra être valablement établi qu’au vu d’un bilan le plus complet possible de l’état des consommations. L’Observatoire doit agir avec force et détermination pour obtenir les budgets de rénovation indispensables – dans le cadre du budget annuel actuel, force est de constater que les actions seront nécessairement limitées ou de longue durée (ce qui ne veut pas dire qu’on doit attendre pour les démarrer) L’Observatoire doit aussi mettre en œuvre et c’est sa fonction les priorités scientifiques qui nécessitent pour continuer d’exister dans la recherche mondiale des investissements : fibre 10Gbs, container MESOPSL, projets IA, etc. Une politique équilibrée d’établissement doit être discutée (et c’est le rôle du CA) pour mener de front l’ensemble.
Bilan carbone : Vous engagez-vous à réaliser un bilan carbone 3 scopes à l’image de celui fait par le labo ISTerre (doc Labos1.5 IST, slides 9-12) ?
R. Oui sur scope 1 et 2, qui sont directement accessible à l’établissement : moins clair sur Scope 3 qui relève de beaucoup d’éléments disparates hors de contrôle direct de l’établissement.
La gestion des bâtiments est du ressort de l’établissement : Vous engagez-vous sur l’objectif de réduire la consommation d’énergie typiquement d’un facteur 2 en 10 ans ? (bilan l’année 0 et réduction de 5% par an).
R. une analyse plus fine est nécessaire pour connaître la véritable marge de manœuvre de l’établissement. Certaines actions sont évidentes et peuvent être mises en place dès maintenant (ajustement et contrôle de la température des bâtiments, limitations des chauffages individuels aux strictes nécessités, etc.) ; les opérations lourdes d’isolation thermique des bâtiments dépendront de l’accès de l’OP à des budgets de l’état (CPER, programmes spécifiques pour la rénovation énergétique des bâtiments publics, etc.) L’engagement ne peut porter que sur la volonté de recueillir ces budgets, mais un bilan chiffré est prématuré et ne serait à ce stade qu’une promesse de campagne mal étayée...
La gestion des missions et de l’informatique est coordonnée avec les laboratoires. Vous engagez-vous à mettre en place et coordonner des actions des laboratoires avec un même objectif (réduction de 50% sur 10 ans) sur ces postes ?
R. Pour l’objectif chiffré, il ne doit pas non plus être appliqué de manière brutale avant une évaluation fine des possibilités d’action. Oui, les actions envers les laboratoires (qui gèrent une grande partie des budgets missions via le CNRS, ne l’oublions pas) sont nécessaire et seront engagées. Pour les missions, une condition d’attribution de crédits de colloques au CS peut être la mise en place de solutions visioconf pour limiter les déplacements par exemple.
Energie : Une pré-étude de panneaux photovoltaïques pour le site de Meudon a été faite par l’association Solaire Citoyen Seine Ouest :
Que pensez-vous de cette idée, et éventuellement comment-voyez sa mise en oeuvre ?
R. L’idée est intéressante et doit être étudiée de près. Une question de méthode : on ne peut avancer de telles solutions qu’en y associant les services de l’Observatoire (DIL essentiellement) en amont. Je proposerai une démarche prudente : pré-étude pouvant aller jusqu’à un projet pilote avant tout engagement massif. Les questions d’implantation sont très nombreuses : possibilités d’implantation sur les toits (résistance au m2 compte-tenu de la tenue au vent, domaine utilisable au sol autorisé par l’AMH, possibilité de revente à EDF, etc.) Il faut enfin évaluer le retour apporté sur investissement qui doit être attractif sinon il vaut mieux utiliser le budget sur d’autres actions...
Circulation douce et abris -vélos et circulation : Que pensez-vous faire pour favoriser la circulation douce vers et à l’Observatoire ? Vous engagez-vous à faire installer les abris-vélos achetés depuis de nombreuses années ?
R. OUI ; une solution doit être trouvée en accord avec les préconisations AMH
Restauration : Vous engagez-vous à ce que le prochain contrat de restauration propose un plat végétarien par jour et se limite à des produits de saison et locaux.
R. OUI – il faut l’inclure dans le prochain contrat
Actions de formation et d’information des personnels : Vous engagez-vous à mettre en œuvre des formations du personnel pour accompagner les changements à mettre en œuvre (par ex. des formations au bilan GES)
R. OUI – à inclure dans le plan de formation, en harmonie avec les autres demandes
Administration
Le CA sortant s’était doté d’une commission énergie-climat. Souhaitez-vous reconduire cette commission ? avec des modifications ?
R. OUI – le fonctionnement devra cependant être optimisé : la commission a un rôle essentiel de relais sur ces questions vers le CA et doit être maintenue. Elle peut et doit avoir aussi un rôle de conseil lors de l’élaboration des différents projets d’ampleur à l’OP un peu comme les fonctions d’un « ingénieur qualité climat ». Il faut veiller à ce que la CEC ne joue pas un rôle de simple commission
de contrôle qui paralyse un peu plus l’établissement, mais au contraire travaille en synergie avec les services, et donc soit impliquée dans les discusions
Econome de flux : Souhaitez-vous recruter un économe de flux ? Sous quelle forme ? Comment voyez-vous son rôle ?
R. Le rôle exact en est encore à définir. Voir la résolution du CA du 11/10 nommant en CDD un poste d’économe de flux– il n’y a pas aujourd’hui pour un établissement de taille moyenne comme l’OP forcément l’utilité d’un ETP à plein temps, donc une analyse poussée des besoins/attentes devra être faite sur la base de ce CDD, mais la fonction est indispensable pour l’OP. La question du rattachement dans l’organigramme doit être décidée pour la meilleure optimisation des tâches.
Le CA a également voté une délibération demandant de "placer la transition écologique au cœur des priorités de l’Observatoire de Paris et à mettre tout en œuvre pour mesurer, suivre et abaisser sa consommation énergétique et son empreinte carbone selon les textes en vigueur."
Quelle place souhaitez-vous donner à la déclaration du CA dans les priorités d’actions de l’établissement ?
R. Les déclarations d’intention sont utiles, en particulier vis-à-vis des instances extérieures pour montrer l’engagement de l’OP. La place de ces délibérations sera jugée sur les actions futures menées grâce aux engagements précédents.
Positions et actions de l’OP à l’(inter)national et dans la discipline
Pensez-vous interagir avec les tutelles (CNRS, INSU…) pour engager la sobriété énergétique de la discipline ? Par exemple : (voir les demandes de Labos 1.5, diapo 22 ; voir aussi le rapport du groupe H et le forum de discussion en préparation de la prospective de l’INSU.)
R. L’Observatoire peut agir dans différentes instances : PSL, CPU, INSU en particulier comme acteur et promoteur d’initiatives diverses. L’INSU grâce aux laboratoires des sciences de la Terre est en première ligne sur ces actions. L’Institut Pierre Simon Laplace (regroupant des labos de région parisienne, dont le LERMA à lOP) est très impliqué dans le GIEC ; j’ai longtemps fait partie du conseil scientifique de l’IPSL, je connais très bien les acteurs de ce domaine et peux relayer et insérer l’Observatoire dans les actions communes
– demander aux instances de recrutement et d’évaluation (CNAP, Section 17...) de diminuer le poids mis sur des aspects type « nombres de conférences invités » qui de fait encouragent des déplacements coûteux en carbone ?
R. En premier lieu, l’OP n’est pas responsable des critères de recrutement nationaux des instances CNAP ou CoNRS. C’est une initiative qui comporterait des effets pervers importants : mettre en situation d’infériorité les jeunes chercheurs dans la compétition au niveau international, favoriser le chercheur médiocre immobile par rapport au leader international, etc.
– pensez-vous qu’il est souhaitable/possible d’intégrer le bilan carbone des projets de la discipline dans leur sélection et leur évaluation, que ce soit au niveau de l’Observatoire ou au niveau national ?
R. Dans la sélection des projets : oui, on peut intégrer un critère (incitation budgétaire, voire obligation statutaire à la mise en place de solutions visioconf pour les colloques ou réunions de team). Dans l’évaluation : non car ce serait interférer avec l’évaluation de l’excellence scientifique qui doit être la règle première et pourrait conduire à des dévoiements...
– Acceptez-vous de soutenir (personnellement et au nom de l’observatoire) l’appel pour former les étudiants du supérieur pour décarboner la société et de promouvoir ces enjeux au sein de PSL ?
R. OUI. Je mentionne au passage que la VP-CS que je proposerai (Laurence Rezeau) est très impliquée dans les questions énergie-climat, et a participé avec Pierre Léna à la rédaction des programmes du secondaire qui mettent un fort accent dans les options scientifiques sur la question.